
Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur vous ?
Je suis actuellement assistante spécialiste (ancien régime) en ORL à l’hôpital de Valence, après 5 ans d’internat à Lyon, et un externat dans les hôpitaux marseillais.
En 2021, vous avez intégré le PAPA (Parcours d'Aide à la Publication de l'AGIL) destiné aux internes lyonnais pour les accompagner dans leur travail de thèse.
Quel était votre sujet de thèse ?
J’ai trouvé mon sujet de thèse définitif après une première « fausse-route » ; un premier sujet enthousiasmant, mais dont les résultats préliminaires se sont malheureusement avérés peu concluants (nous souhaitions explorer l’hypothèse d’une étroitesse congénitale des conduits auditifs internes pourvoyeuse de symptômes vestibulaires paroxystiques, une étiologie encore jamais décrite à notre connaissance). Avec l’aide de mon chef de service et du chef de clinique de mon semestre suivant, j’ai pris le parti de repartir à zéro pour contribuer à cette étude rétrospective, à la fois descriptive et analytique, qui s’intéresse donc à « L’évolution spontanée de l’audition des patients surveillés pour un schwannome vestibulaire considéré comme non évolutif ».
Comment s'est déroulée toute cette période de thèse ?
Comme tout un chacun sans doute, je garde forcément le souvenir d’une période exigeante, parfois éprouvante (nécessité de remplir les objectifs attendus dans les délais impartis, et ce en dépit de journées/semaines parfois chargées à l’hôpital), plus ou moins stressante… Néanmoins, je garderai un assez bon souvenir de cette expérience, car j’ai la chance de l’avoir vécue dans les meilleures conditions qui puissent être : avec un accompagnement optimal. L’année précédente, n’ayant pu avoir accès au PAPA en avance, j’avais néanmoins pu assister aux cours dispensés par le Dr Maisonneuve. Cela m’avait déjà permis de disposer des « règles de bonnes pratiques » pour bien aborder un travail de thèse. L’année suivante, après changement de mon sujet, j’ai donc eu la chance de pouvoir bénéficier, d’une part, d’un accompagnement rigoureux par le PAPA ; et d’autre part, de la supervision précieuse de mon chef de clinique, le Dr Maxime Fieux, lui-même ancien disciple et actuel intervenant du PAPA.
Cet encadrement m’a beaucoup apporté, et ce sur tous les plans. Sur le plan théorique (formulation de la problématique, grands principes des méthodes de recherches… avec des interventions qui m’ont surtout aidée à prendre du recul sur les choses), mais aussi et surtout sur le plan pratique. Quels formulaires renseigner (MR004 ou autre) en fonction du type d’étude mis en place ? Comment optimiser mes recherches sur bases de données, pour obtenir la bibliographie la plus complète et précise possible ? Comment établir mon retro-planning de thèse, dans quel ordre et dans quel timing organiser ma rédaction ? Autant de réponses concrètes apportées par les intervenants du PAPA. Au-delà de ces interventions ponctuelles, ce parcours offre la possibilité d’échanger tout au long du processus avec des interlocuteurs privilégiés : un interne de santé publique sans lequel les analyses statistiques paraissent vite insurmontables (je remercie encore ma binôme, très investie et réactive), un traducteur anglophone si nécessaire, et M. Giorgio, que je remercie encore chaleureusement pour son aide bibliographique précieuse…
Pour ma part, le PAPA fut autant une source d’aide concrète, que de soutien psychologique, et de motivation à respecter mes échéances. Dans le processus de la thèse, il n’est rien de plus démoralisant qu’une traversée du désert en solitaire… À ce titre, le PAPA est donc une oasis des plus rassurante !
Parlez-nous plus en détail de votre travail de thèse. Les résultats obtenus, les applications concrètes qui peuvent en découler, …
Mon travail de thèse s’attachait donc, dans son objectif principal, à décrire l’évolution spontanée de l’audition des patients surveillés (et donc, ni opérés, ni traités par radiothérapie) pour un schwannome vestibulaire de petite taille, considéré comme non évolutif à l’IRM. La littérature semblait déjà supporter l’hypothèse selon laquelle l’audition de l’oreille porteuse du schwannome se détériorait plus rapidement dans le temps que celle de l’oreille saine, même en présence d’une tumeur parfaitement stable dans ses dimensions. Cette hypothèse s’est vérifiée dans notre travail puisque 61 % des patients dégradaient leur audition au cours du suivi (même si nos critères permettant de définir la perte auditive ou la croissance tumorale pouvaient sur certains points différer du reste des publications), sur une série de 139 patients avec un recul moyen de 5,9 ans. L’objectif secondaire de cette étude était d’ordre analytique, puisque nous cherchions à identifier des facteurs prédictifs d’une dégradation plus rapide de l’audition chez certains patients. La présence sur l’IRM d’un élargissement des berges du conduit auditif interne par la tumeur, et une altération initiale de la classe auditive du patient se sont révélés être des facteurs de mauvais pronostic auditif (avec des HR respectifs à 5,23, p < 0.001 / 2.21, p < 0.01).
Ces considérations peuvent nous aider à discuter de la prise en charge individuelle de chaque patient, dans cette pathologie où les modalités thérapeutiques sont nombreuses (surveillance, chirurgie, radiochirurgie…) et le choix complexe. Identifier ces facteurs de risque de détérioration auditive chez un patient peut donc, en théorie, nous inciter à discuter plus volontiers d’un traitement actif -s’il permet de préserver l’audition tant qu’elle est encore fonctionnelle-, plutôt que d’opter pour une simple surveillance, même si le schwannome n’est pas évolutif. Ma discussion thérapeutique reste cependant complexe, puisque le résultat auditif n’est pas le seul à entrer dans l’équation (il y a également les risques de paralysies faciales, de complication chirurgicales, etc…).
Quels sont vos projets professionnels pour la suite ?
Mes projets professionnels rejoindront dans 2 ans mes projets de vie personnelle, puisque mon compagnon et moi-même avons prévu de nous installer dans la région de Gap, où j’exercerai une activité libérale que je couplerai peut-être à terme à un temps partiel à l’hôpital. Pas de carrière hospitalo-universitaire en vue, donc, de mon côté ! C’est également ce qui m’a finalement incitée à opter pour un assistanat dans un petit CH de périphérie, à l’activité diversifiée et polyvalente assez représentative de l’exercice en ville, plutôt qu’un clinicat orientant vers une sur-spécialisation plus propre au CHU.
Un dernier mot à adresser à vos confrères internes et anciens internes de Lyon ?
Si vous hésitiez encore à demander le PAPA, lancez-vous ! Prenez le temps de trouver LE sujet que vous aurez plaisir à creuser, entourez vous de gens disponibles pour vous accompagner… et faites de cette « petite formalité » dans notre cursus une aventure heureuse (et qui fera peut-être un jour votre fierté lorsqu’elle trônera sous sa forme publiée dans votre bibliothèque) !
Propos recueillis le 17 mai 2022.
Pour en savoir plus sur le PAPA (Parcours d'Aide à la Publication de l'AGIL)